Pour peu qu’on suive la scène du jazz new yorkais, on ne peut passer à côté du phénomène « Gilad Hekselman« , et ce que l’on soit guitariste ou non. Voilà déjà 10 ans que le jeune guitariste s’est installé dans la Mecque du jazz : d’abord sur les bancs de la New School puis rapidement il se retrouve à jouer avec la clarinettiste-saxophoniste Anat Cohen puis avec le batteur Ari Hoenig. Rapidement il fonde son trio avec le batteur Marcus Gilmore et le contrebassiste Joe Martin. L’évolution de Gilad a été extrêmement rapide et sortir 5 albums en tant que leader à son âge tout en étant accompagné de certaines légendes du jazz (Mark Turner notamment) est tout simplement révélateur de son indéniable talent.
J’ai un rapport assez spécial avec son second album « Words Unspoken », car je me rappelle que ce fut le premier album que j’ai acheté de manière digitale (en 2008 donc) ! C’est aussi un fabuleux album que j’ai beaucoup écouté.
Que dire de l’évolution de Gilad sur ce nouvel opus ?
« Homes« se veut être une réflexion sur l’identité d’un artiste dans le contexte toujours grandissant de la mondialisation : en effet qu’est-ce qu’être un artiste venant de tel ou tel pays aujourd’hui? À peu près tout et rien, car avec la facilité d’accès à la musique et aux voyages, peu importe d’où vous venez, c’est par la façon dont vous allez utiliser vos influences que vous allez modeler votre musique. Ainsi Gilad Hekselman nous propose une grande variété dans la sélection des titres du disque, illustrant la grande diversité de ses influences :
Bossa-nova avec « Samba em Preludio » de Baden Powell, bebop avec « Parisian Thouroughfare » de Bud Powell, influence de certains rythmes africains dans une composition de Gilad intitulé « KeeDee« , ou encore pop (dans « Verona » écrite par le guitariste ou « Dove Song » de Matti Caspi). Ça ne s’arrête pas à là puisqu’il y a même une reprise de Pat Metheny, « Last Train Home » et un titre difficilement descriptible que je qualifierai de manière assez hasardeuse comme « fusion » (« Cosmic Patience« ).
Quant à son jeu de guitare, que dire? J’ai trouvé une plus grande retenue et un Gilad Hekselman de plus en plus au service de la musique. La façon dont il interprète une simple mélodie (« Dove Song« ) force l’humilité. Les chorus sont construits intelligemment et racontent toujours une histoire. Sa gestion des up-tempo (« Parisian Thouroughfare ») est fascinante et très instructive aussi pour tout instrumentiste.
Globalement dans ce disque, il y a une grande justesse d’interprétation.
Ses compositions sont de plus en plus intéressantes aussi : « Eyes to See », ma préférée, à ce niveau là, montre que Gilad écrit un morceau pour son trio comme un songwriter écrirait une chanson où il s’accompagnerait à la guitare.
Malgré la grande diversité du disque, la cohérence est gardée et c’est l’identité du jeu de Gilad Hekselman qui est mise en valeur. Finalement Gilad arrive à trouver son « Heimat » dans la mise en relation de ces différentes « Homes« .
[thrive_leads id='823']